Le Père Filip, Philippe Heymans de son nom civil, fut une figure importante du quartier Anneessens. Il a dirigé durant plus de 15 ans années un club de jeunes de la rue d’Artois . Dans ce club il recevait plus d’une centaine de jeunes. Il était présent tous les soirs de 17 heure à 20 heure. Comme activités sur place : une bibliothèque, des jeux de kiker, un club de photo, des équipes de football … il fêtait aussi les anniversaires, ce qui n'était pas la coutume dans les familles marocaines par exemple. Ils les faisaient aussi intervenir dans la maison pour de menues réparations afin leur donner goût au métier.

Moments importants également, les sorties. Que ce soit à la côte belge ou dans les Ardennes. Presque toujours avec sa camionnette mythique. Il sortait de la ville pour la campagne, leur faire découvrir des autres univers, des autres mode de vie comme le camping par exemple. Des fois même il se rendait en Espagne, en Asturies dont beaucoup de jeunes étaient originaires.

La photographie devait être une de ces passions majeures vu la quantité de clichés retrouvés à la mort de Philippe en 2004. Une dame dépose en 2014 une grande boîte de photos à Recyclart. 

Les photographies sont présentées à différents occasions et sous plusieurs formes dans le centre (mini exposition, projection). Mais le moment le plus intéressant arrive. Des affiches sont placardées dans la rue, un appel est lancé. Il s'agit de retrouver les jeunes sur les images.

Six personnes se manifestent, des jeunes de l'époque se sont reconnus ou des amis à eux leur ont donné le signal de ce appel. Ils prennent contact et vont revoir ces images, souvent des clichés qu'ils n'avaient pas vu depuis plus de 30 ans ou même jamais vu. L'émotion est à son comble et leurs réactions sont enregistrées. De témoignages en anecdotes la vie de l'époque est retracée. Les souvenirs heureux de vacances comme les tragiques années 80 où la drogue a fait des ravages dans cette génération. Beaucoup des jeunes ont disparus.

Ce travail de mémoire nous a semblé d'un intérêt capital pour retracer une époque, une histoire de quartier, des vies oubliées des années 70 et 80 à Bruxelles. Ces photographies constituent une trace que nous voulions partager vu que ce style de mémoire disparaît au profit souvent de la grande histoire. Mais outre l'intérêt patrimonial ce sont aussi la qualité des clichés, les cadrages simples et efficaces, les poses des jeunes qui semblent en parfait accord avec le photographe. L'aspect sériel des images est assez surprenant aussi. Chaque jeune posant l'un après l'autre devant un bloc de roche ou sautant d'un train.

Ces images ont donc une deuxième vie. 

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